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Caroline LEITE



"Sculpteur – photographe, Caroline Leite travaille essentiellement sur la question du temps : un temps visité comme on fouille un espace géographique.

Elle sculpture des ruines de béton, des fragments de notre présent, objets, végétaux ou encore corps.  Tous semblent venus du passé, visiteurs muets d'un temps ancien, fossiles extraits d'une fouille archéologique.

Le présent devient révélateur d'un passé, télescopage des époques, passé fictionnalisé d'un hier inventé, pour être mis à jour et visité aujourd'hui.

Ses ruines sont ensuite mises en scène répondant à sa volonté d'aller au bout de son questionnement sur le temps : ce sont ses boîtes de verre, vitrines ressemblant à des reliquaires, présentant des sculptures aux allures de vestiges mystérieux.

La main cassée, reconstituée, le visage usé ou incomplet, prennent alors une identité historique dans leur vitrine muséifiante.

La proposition artistique se poursuit aussi avec la photographie. Tirage argentique sur plaque de béton, l'œuvre est double : iconique et minérale, matière et révélation. Le pavé de béton accueille l'image qu'il sublime.

L'image photographique renvoie elle aussi au passé. Comme si photographier le présent c'était être possédé par le passé. Image de bâtiments, de jardins d'aujourd'hui, flous, griffures, rayures de surface, imperfections des bords de la pierre support, l'image est narration tout autant que matière, déguisée en document historique. Impression de vieux daguerréotypes exhumés.

Caroline Leite livre une œuvre polymorphe et cohérente, cherchant la beauté et la fascination.

La fascination vient de cette promesse de multitude. Sculpture et photographie qui révèlent une fausse historicité. Sculpture qui raconte une image de l'humanité en prise avec ses questions ou ses émotions. Photographie "matière" qui épouse et révèle une minéralité sublime, une matérialité renvoyant elle-même à la sculpture "iconique".


Matière, image, forme et mouvement silencieux se rejoignent dans un tout organisé, malicieux et manipulateur, qui nous oblige à des regards attentifs et pluriels : d'une main à un visage, d'un autoportrait englouti dans la pierre au détail imprimé d'une ville qui semble surgie du passé."
Marc Gauthier